En 2010, le législateur belge a modifié la loi en imposant au regroupant qu’il devait disposer d’un logement répondant « aux conditions posées à un immeuble qui est donné en location à titre de résidence principale, comme prévu à l’article 2 du Livre III, Titre VIII, Chapitre II, Section 2, du Code civil ».

Jusqu’en 2010, la matière était régie par l’article 9 de l’arrêté royal du 27 avril 2007 qui déclarait que « le logement était réputé suffisant sur base d’une attestation délivrée par les autorités communales de laquelle il apparaissait que le logement concerné satisfaisait aux exigences de sécurité, de santé et de salubrité en vigueur dans la région concernée, c’est-à-dire au Code du logement »

[1].

Le 26 février 2010, le Conseil d’Etat annule cette disposition sous le motif « qu’en liant le regroupement familial au respect inconditionnel des normes régionales de qualité des logements, l’arrêté royal dénaturait la notion de logement suffisant au sens des articles 10 et 10bis de la loi du 15 décembre 1980 »[2]. En effet, l’objectif poursuivi par la loi du 15 décembre 1980 ne semble pas rejoindre celui du Code du logement. Si l’on se tourne vers les travaux préparatoires de la loi du 15 septembre 2006, l’exigence de disposer d’un logement suffisant a pour ambition d’apprécier le respect des normes fondamentales de salubrité et de sécurité, et de lutter contre les marchands de sommeil alors que le Code du logement tend à réglementer par le biais de règles strictes, techniques et précises les logements mis en location.

C’est ainsi que la condition du « logement suffisant » a été régie par l’arrêté royal du 26 août 2010 modifiant l’arrêté royal du 8 octobre qui stipule désormais que : « Constitue un logement suffisant au sens des articles 10 et 10bis de la loi, le logement qui répond, pour l’étranger et pour les membres de sa famille qui demandent à le rejoindre, aux exigences élémentaires de sécurité, salubrité et habitabilité au sens de l’article 2 de la loi du 20 février 1991 modifiant et complétant les dispositions du Code civil relatives aux baux à loyer. »[3] Afin d’apprécier le respect de cette condition, le regroupant doit transmettre la preuve d’un contrat de bail enregistré portant sur le logement affecté à sa résidence principale ou la preuve du titre de propriété du logement qu’il occupe. Bien entendu, la condition ne sera pas respectée dans le cas où une autorité compétente déclare le logement insalubre.

Toutefois, il convient de relever que le législateur utilise une terminologie différente à l’article 10 et 10bis de la loi du 15 décembre 1980 pour désigner cette notion. Alors que dans l’article 10 de la loi, il fait référence à un « logement suffisant », il utilise à l’article 10bis de la loi d’autres termes, à savoir « logement décent » ou « logement jugé convenable ». Une telle méthode est peu souhaitable dans un système où la moindre petite différence peut s’avérer être très grande. Certes, le législateur a bien entendu voulu désigner la même notion, il n’en demeure pas moins qu’il est toujours préférable que ce dernier utilise systématiquement la même terminologie[4].

Finalement, bien que le législateur ait entrepris certaines modifications, il n’en reste pas moins que la condition de disposer d’un logement suffisant reste parsemée d’embuches que plusieurs auteurs persisteront à condamner.

 

[1] Art. 9, arrêté royal du 27 avril 2007 modifiant l’arrêté royal du 8 décembre 1981 sur l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et l’éloignement des étrangers

[2] C.E., 26 février 2010, n° 201.374  et n° 201.375, M.B., 6 mai 2010, p. 25394

[3] Art. 26/3, arrêté royal du 8 octobre 1981 sur l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et l’éloignement des étrangers sur l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et l’éloignement des étrangers tel que modifié par l’arrêté royal du 26 août 2010

[4] F. DUTERME, « Regroupement familial : lorsque le Parlement s’en mêle et en durcit les conditions d’octroi » http://www.collectionorange.be/Actualité.aspx?id=166